L'hôtel Art Nouveau de Plombières mobilise
 

(article EST REPUBLICAIN du 12-11-04)

 

Les défenseurs du patrimoine architectural de la Lorraine s'émeuvent du sort de l'ancien Hôtel du Parc voué à la démolition. Une action en justice est engagée.
 

EPINAL. « Un recours a été déposé il y a dix jours en sursis à exécution », explique Me Laffon, du Barreau de Nancy, saisi par l'association Avancée de Plombières, présidée par Marcel Pirih, qui s'est constituée autour de la défense du patrimoine plombinois. Il doit être examiné aujourd'hui par le tribunal administratif de Nancy. « S'il est accepté, l'affaire sera ensuite jugée au fond. »

 

Le bâtiment Art Nouveau de Plombières menacé de démolition (voir notre article du 5 septembre) se trouve dans le lieu le plus stratégique au plan patrimonial de la cité thermale. Entre le casino et les Thermes Napoléon classés.

 

« L'urgence caractérisée ne fait pas de doute. Sur la forme, la mairie est propriétaire du bâtiment, mais le conseil municipal n'a pas donné son assentiment à sa destruction, mais seulement le maire. Sur le fond, la mairie n'a pas présenté de mémoire en défense sur les arguments que nous lui opposons. »

 

Une position contradictoire

 

L'avocat s'interroge également sur la position même de l'ABF qui lui semble contradictoire, puisque dans le même temps où l'on déclare le bâtiment mériter d'être sauvegardé, on autorise sa démolition, alors que l'architecte est précisément chargé de veiller à l'intégrité du patrimoine, à l'intérieur de la « ZPPAUP », périmètre protégé sur lequel il a autorité.


Une remarque qui n'a pas échappé non plus à Denis Grandjean, directeur de l'École nationale d'architecture de Nancy, qui s'est ému avec plusieurs enseignants et élèves de son école de la destruction envisagée du site. « Cela me fait penser aux péripéties nancéiennes de la tour Thiers, lorsque cet immeuble s'est élevé sur les ruines du coeur Belle époque de la ville, qui ne s'en est jamais remis. »

 

« J'ai signé la pétition lancée par l'association de défense plombinoise », note celui qui est également chargé du patrimoine comme élu de la communauté urbaine du Grand Nancy. « L'ancien Hôtel du Parc est au coeur d'une zone historique à la personnalité très forte, le Plombières du Second empire. Ce n'est pas tant la valeur architecturale du bâtiment de Plombières qui est en cause, que son environnement, un ensemble exceptionnel où il a sa place.

 

Comme à Nancy où les maisons qui bordent la rue Stanislas n'ont pas une valeur architecturale énorme par elles-mêmes, mais elles s'inscrivent dans la ville de Stanislas, et dans la perspective de la place. On ne peut y toucher. Il y a tout de même des solutions plus subtiles que la démolition !

 

Par ailleurs, la ZPPAU est faite pour protéger ces bâtiments, pas pour les démolir. Comment peut-on s'exonérer de sa mission ? C'est une situation peu compréhensible. On fait table rase pour reconstruire... on ne sait trop quoi ! C'est d'autant plus grave pour Plombières que le patrimoine bâti de cette ville est son vrai pétrole, ce qui fait que les gens iront plutôt à Plombières pour son style, son atmosphère, plutôt que dans telle autre station thermale... »

 

Les antiquaires

 

Il serait dommage que la démolition, qui coûte d'ailleurs très cher n'enrichisse que les antiquaires spécialisés dans la récupération... Une éventualité que se refuse à connaître Dominique Bruillard, architecte lui-même et opposant déclaré à la municipalité Dubouis. « Le maire a lui-même demandé en 2002 le classement de cet immeuble, dont l'escalier est très proche du Jugendstil allemand, pour le protéger. Mais comme cela n'a pu être obtenu tout de suite, il profite de l'intermède pour le faire démolir afin de mettre à la place la maison de retraite qui manque à la ville !

 

Ce dernier programme est une urgence absolue, l'actuel établissement n'étant plus du tout aux normes de sécurité. En bâtir un nouveau prendra du temps. Une fois la démolition faite, il y aura des fouilles archéologiques, car on sait qu'il y a des vestiges à cet endroit. Il faudra des années pour qu'une nouvelle maison de retraite voie le jour ! »

 

Guillaume MAZEAUD
EST REPUBLICAIN

Marcel Pirih, président d’Avancée. Derrière lui, le bâtiment destiné à la destruction pour laisser place à une maison de retraite.
Photo Philippe BRIQUELEUR (Est-Républicain)